Les archives et le document historique sont une arme tout à la fois efficace et redoutable. L’historienne et directrice des archives Royales, Bahija Simou, vient de le prouver, une fois de plus. L’historienne, spécialiste de la réforme militaire à travers l’histoire du Maroc, a en effet fait paraître un ouvrage en trois tomes publié, en arabe, sous le titre «Le Sahara marocain à travers les archives Royales». Un beau livre, un ouvrage d’histoire et surtout une publication qui apporte la preuve, par le document, le manuscrit et autres correspondances inédites, de la marocanité du Sahara. Ici, Bahija Simou a fait ce qu’elle maîtrise à merveille. Historienne passionnée qui sait se transformer en fourmi infatigable, l’auteure s’en est allée à la recherche d’archives jamais explorées. De la France à l’Italie en passant par l’Espagne, B. Simou a fouiné, cherché, restitué l’histoire et surtout, rafraîchi une mémoire rétive. Dans les archives Royales entièrement numérisées depuis qu’elle les dirige, elle a trouvé une mine d’informations, des manuscrits précieux –reproduits dans son ouvrage en trois tomes- des témoignages à la valeur inestimable qui contribuent fortement à apporter la preuve que « le Maroc puise son histoire dans les fins fonds des provinces sahariennes».
On feuillette l’ouvrage –qui est de très belle facture- et l’histoire se fait soudain limpide, évidente, définitive. On tombe sur les actes d’allégeance adressés par les tribus sahraouies aux Sultans et Rois. On s’arrête sur les Dahirs relatifs à la désignation des caïds, walis, gouverneurs et juges auprès de ces tribus. L’œil du lecteur peut aussi fixer ces actes concernant l’organisation des campagnes militaires, la perception des impôts, l’édification de bâtisses, la commercialisation de marchandises ou encore la sécurisation des routes commerciales. Autant de documents historiquement inattaquables qui donnent à voir une présence continue et permanente du Sahara au sein du pouvoir central mais aussi et surtout la souveraineté exercée par l’Etat à travers les nominations dont Bahija Simou publie les décrets.
D’une archive à l’autre, d’un pays à l’autre, des documents sortent de l’ombre pour mettre en lumière «les efforts consentis par les Sultans et les Rois de la dynastie Alaouite pour défendre l’intégrité territoriale du Royaume». L’historienne, celle-là même qui a publié l’an passé un ouvrage fondateur sur l’acte d’allégeance, ne laisse pas place au doute.
Quand les Sultans du Maroc évoquaient leurs oncles du Sahara…
A travers caravanes commerciales et expéditions militaires, des liens se sont plus que tissés, gravés. Dans «Le sahara marocain à travers les archives Royales», Bahija Simou traite aussi des liens qui justement existent entre le Sahara et les autres régions du Maroc. Il est là question de mélange et de brassage des tribus à travers un véritable voyage généalogique qui nous conduit dans les terres des R’hamna ou à Kelaat M’Gouna -pour ne citer que ces deux territoires- où les tribus sahraouies se sont établies. On se mélange, on se marie, les familles s’agrandissent. Les alliances se nouent, des liens de sang s’établissent jusque dans la dynastie Alaouite. Dans des correspondances officielles que publie B. Simou, les Rois du Maroc évoquent leurs oncles du Sahara…
Un fil rouge détermine cet itinéraire, le rite malékite qui, pour l’auteure, dessine l’espace politique dans une même appartenance tribale, ethnique et au final religieuse.
«Le Sahara marocain à travers les archives Royales» est bien plus qu’un événement dans le monde de l’édition. C’est un livre phare qui livre, en exclusivité mondiale, des éléments d’histoire et des preuves historiques de la marocanité d’un espace géographique. Le personnel politique mais aussi et surtout diplomatique y trouveront arguments et vérités qui viennent rompre avec un discours officiel sans réel contenu. L’on ne saurait enfin trop conseiller sa lecture à l’envoyé personnel du Secrétaire général des Nations unies pour le Sahara.