Les images ont fait le tour du monde. Le Roi du Maroc, dans une voiture décapotable, traversant une place où la foule en liesse l'acclame. Mieux, il est allé au milieu de la foule, serrer les mains, reléguant son service de sécurité. Ceci s'est passé sur un territoire dit contesté, le fameux Sahara occidental. Or, ce sont les mêmes images, la même ferveur, la même voiture, que ceux, de son tour d'amis, à Tanger, à l'autre extrémité du Maroc, avec François Hollande il y a quelques mois. Les images sont saisissantes, la réalité est plus complexe. Le conflit dit du Sahara est factice. Le Maroc a récupéré ce territoire dont il a été amputé, lors des compagnes de colonisation, de manière pacifique grâce à la Marche Verte, une mobilisation populaire sans égal au niveau de l'histoire.
La France, quelque soit la majorité, a toujours penché du côté d'un règlement définitif en faveur du Maroc. Malgré l'intimité entre les deux hommes, Hassan II a reconnu publiquement que c'est sur instance de François Mitterrand qu'il a accepté le principe d'un référendum confirmatif. Celui-ci n'a pas pu être tenu, parce que le Polisario a voulu réduire le corps électoral à ses propres partisans. Ensuite, quand le Maroc a fait sa proposition d'autonomie élargie, comme solution de sortie de crise, la France l'a continuellement soutenu.
Cette affaire, ce conflit dure depuis 40 ans. Il est un héritage du temps de la guerre froide. Pendant ce temps, le monde a changé. Le Maroc et l'Algérie, pour des raisons très différentes, sont les deux seuls pays de la région à être sortis indemnes du fameux "Printemps Arabe". Au Sud subsaharien, le terrorisme, les trafics de tous genres, menacent la stabilité de tout le pourtour méditerranéen. La France est militairement impliquée dans cette lutte.
Tous les spécialistes attirent l'attention sur trois vérités. La première c'est que les camps de Tindouf, peuplés de jeunes désespérés, sont très perméables aux différentes mouvances agissant dans la région. La seconde c'est que l'Algérie vit une transition très complexe. Enfin, l'intégration économique régionale est à même de faire du Maghreb un hub pour l'Afrique, un pôle de stabilité de croissance au profit de l'économie mondiale, de la France, mais surtout des populations en place, qui profiteraient d'une prospérité partagée.
Depuis 22 ans, tous les dix mois, la France vote en faveur du renouvellement du mandat de la Minurso, donc du statu-quo. Celui-ci n'est plus tenable, parce que les enjeux sécuritaires, économiques, ont changé et ont pris une dimension planétaire. Paris doit sortir de la recherche d'un accord, rompant avec le passé, et s'inscrivant dans une vision d'intégration. Jamais le moment n'a été aussi propice à une telle initiative.
Par Ahmed CHARAI